Roger Tallon : Le prototype peut interroger la technique 

Dans les années 1950, en France, personne ne parle encore de « design » tel que nous le connaissons mais plutôt « d’esthétique industriel » un terme que réfute totalement Roger Tallon.
Il est engagé comme consultant par Dupont de Nemours et Caterpillar qui sont des firmes américaines développant l’idée du design comme étant une activité globale et partie intégrante de la structure de l’entreprise.
À son retour en France, de 1953 à 1973, Roger Tallon aborde tous les domaines : machines-outils, électro-ménager, appareils photo et caméras, machines à écrire, poste de télévision, matériel de bureau et crée plus de 400 produits industriels.
C’est durant ces années que Tallon va engager une réflexion sur la complexité du design et son application à tous les domaines de la société.
Par exemple, le téléviseur portable Téléavia P111, crée en 1963, est une innovation formelle dans le design des téléviseurs et une vraie réussite commerciale. Il reste encore aujourd’hui un objet culte.

À partir de 1950 et pendant une quinzaine d’années, Roger Tallon va se consacrer à ce qui lui semble être l’essence même de son travail : le design industriel. La plupart du temps, ces projets trouvent leur origine dans une commande pour des collectivités. Notamment les chaises Wimpy, qui doivent meubler les premiers fast-foods installés en France. 
Ces commandes vont permettent d’expérimenter de nouvelles méthodes de fabrication, par exemple, les pieds des chaises Wimpy, sont en aluminium sous pression. Cette technique est caractéristique des pratiques industrielles qui sont alors peu utilisées dans le monde du mobilier, mais que Tallon va utiliser régulièrement. 
Dans le même esprit de lien avec l’expérimentation des méthodes de conception industriel, on retrouve les sièges de bureau Medius pour l’entreprise Eurosit en 1979. Pour cette commande Roger Tallon adopte un procédé venu de l’industrie automobile. Il utilise des mousses de polyuréthane moulées que l’on appelle « à peau intégrale ». C’est un matériau servant alors principalement pour les volants de voitures ou pour les accoudoirs de portières et qui évitent de les couvrir de textile.

Ces années d’expérimentations lui ont permis de questionner les méthodes de conception et de production d’un produit de design, cela va l’amener à faire des liens entre différents domaines pour « croiser » les procédés de fabrications et ainsi réaliser des prototypes d’un nouveau genre adoptant des techniques peu usitées pour la réalisation de mobilier. Ses expérimentations ont ainsi ouvert un large questionnement sur le rapport forme/fonction. En outre, rien n’est laissé au hasard, chaque forme, chaque matériau, résultent d’une étude approfondie sur l’usage et non sur l’aspect. Il réfute tout caractère artistique à son design : « Je ne suis pas un intuitif, je suis dans la réalité la plus totale. Mon escalier, apparemment organique, n’est pas un Brancusi. Il est le résultat d’une recherche sur les tensions du caoutchouc, il est aussi concret qu’une hélice d’avion. Je ne plaque pas de l’art sur de l’utilitaire. » 

De gauche à droite : Chaise Wimpy, Sièges de bureau Medius et escalier M400.
ROGER TALLON
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