" On dirait qu’il y a, au sein de notre époque une bizarrerie, une contradiction qui me met presque mal à l’aise et dont je souhaiterais ardemment comprendre la cause. "

" Mais pourquoi ?

Pourquoi se tourner vers le passé pour y puiser son inspiration, alors que notre désir est de se démarquer en créant quelque chose de novateur ? Le passé a déjà existé, il n’a donc rien de nouveau. Pourquoi aujourd’hui y a t’il ce phénomène de recyclage, cette passion pour les choses anciennes auquelle peu de gens semblent échapper ? Mon grand-père dans ses charentaises aurai t’il raison, était-ce réellement mieux avant ? "

" A l'image de la citation de Voltaire, la mode est notre tyran, elle est tyrannique. Elle est reine, femme capricieuse et fardée, au pouvoir immense, qui s’empare de nous pour mieux jouir d’une éternelle régénérescence. Non seulement elle veut que ses admirateurs la suivent, ce qui est assez aisé, mais leurs amis, leurs voisins, leurs chiens, tout le monde, car elle ne tolère pas la moindre exception. "

" Oscar Wilde disait ainsi : «Il n’y a que les esprits superficiels pour ne pas juger sur les apparences. Le véritable mystère du monde est le visible, et non l’invisible.» Il ne s’agit donc pas d’une affectation frivole. L’élégance est l’uniforme du dandy, l’affirmation de ses valeurs sur le théâtre du monde. " 

" Le jean est l’emblème d’une génération constitué de groupes, les jeunes, refusant l’aliénation du corps qui était encore contraint à des distinctions sociales et sexuelles assez strictes. Ceux-ci se sont tous emparé fièrement de ce symbole, au goût d’une révolution fantasmée. "

" On peut facilement avoir crée une illusion. Une femme n’est pas forcément aussi raffinée et fine que ne l’est son chemisier en dentelle, et ses mots ne sont peut-être pas aussi acérés que les talons de ses escarpins vernis. La première impression visuelle doit donc se voir confirmée par des signes fournis aux autres sens. "

" Les vagues irrésistibles de la mode, au mouvement perpétuel, expliquent en partie pourquoi les couturiers, anciens enfants et artistes à la fois, sont constamment en quête d’inspiration, de nouvelles idées innovantes pour survivre. Il n’y a jamais de répit et la concurrence est rude. Cette recherche s’étend forcément grâce à des expériences personnelles, puisant dans le disque plus ou moins rayé aux couleurs vintages de la mémoire, mélangeant les documents historiques clairs et les souvenirs d’une mère faisant tournoyer sa jupe longue et plissée sur une chanson de Gainsbourg."

" L’univers serait donc comme un sablier que l’on renverse, et son contenu s’écoulerait inlassablement un nombre infini de fois, de la même façon qu’il l’a toujours fait, emportant notre existence, cette petite poussière sablonneuse, avec elle. Le moment présent que nous vivons est identique à ce qu’il était dans une autre vie et le sera exactement tel quel dans la prochaine. L’existence ne comporterai rien de nouveau, chaque soupir, chaque pensées et plaisirs, douleurs et colères, tout ce qu’il y a dans la vie d’indiciblement petit et grand devra revenir selon le même enchainement que l’homme l’a déjà vécu. Il faut la revivre encore une fois, et encore d’innombrables fois."

" Les intuitions de mon petit doigt se sont finalement trouvées bien fondées. En effet, se poser cette question sur les cycles s’est peu à peu révélé devenir une entreprise étendant ses multiples bras vers de philosophiques, sociologiques, théologiques, scientifiques, artistiques et autres vastes propos. Autant dire que l’intuition ne m’aurait pas suffit à résoudre ce problème. En est-il d’ailleurs pour autant résolu ici ? "

 

" Je trouve personnellement amusant le fait que le thème de la mode, considéré par quelques personnes comme futile et peu digne d’intérêt, puisse me mener vers l’histoire de la réincarnation, mise en valeur par l’ancienneté de son existence. Pour moi ces deux idées sont liées de part l’importance qu’elles donnent à la mémoire. Ma conclusion est donc celle que je viens d’énoncer, et j’ose supposer que les cycles de mode sont dûs à la capacité de l’homme à oublier. La spirale de la mode, qui symbolise l’innovation dans le retour, représente paradoxalement sa mémoire du passé. La nostalgie l’entraine, par son désir ardent de voir revenir les souvenirs. Quant à l’âme dans la réincarnation, elle n’a aucun souvenir de ses vies précédentes, mais encore paradoxalement, son karma est comme sa mémoire. Chaque acte, bon ou mauvais, est gravé sur sa toile pour l’éternité. "